Témoignage : greffe massive de tibia

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Son parcours

Jessica Berthet a 28 ans et elle est maman d’une petite fille. Elle habite dans le Cher, après avoir vécu à Clermont-Ferrand jusqu’en 2017. Jessica a pu bénéficier d’une allogreffe suite à un accident. Cette opération lui a permis de retrouver mobilité et autonomie. Son métier en tant que monitrice lui a permis de vivre sa passion pour les chevaux. Pendant plusieurs années, elle s’est même occupée de ses propres bêtes.

L’accident

En juillet 2016, lors d’un entrainement en carrière, elle monte une jeune jument, têtue, qui ne collabore pas aussi bien que prévu et fonce dans la barrière au lieu de suivre le virage. Sa jambe reste coincée dans la barrière alors que son corps se retrouve propulsé à l’avant. Elle chute et percute le sol.

Dans l’action et la précipitation du moment, elle ressent une gêne, mais pas l’intensité de la douleur immédiatement. En sportive aguerrie, c’est en palpant sa jambe qu’elle réalise l’ampleur du choc. Une rotation à 90 degrés marque sa jambe au niveau du genou. Elle appelle une collègue, qui contacte les secours. En arrivant sur les lieux, les pompiers remettent la jambe dans l’axe. Elle se rend alors transportée à l’hôpital pour soigner ses blessures et réaliser des examens complémentaires. C’est dans l’ambulance que la douleur se réveille, sursollicitée par le transport et les aléas de la route sur un chemin sinueux.

L’opération

Une fois prise en charge par les urgences, les médecins lui apprennent qu’elle a une double fracture du tibia et du péroné. L’opération n’aura lieu que le lendemain, il lui faut donc passer la nuit à l’hôpital et prendre son mal en patience. Malgré les soins, la morphine en perfusion et le gaz sédatif, les heures sont longues, c’est une nuit très compliquée. L’intervention se déroulera dès la première heure le lendemain. Elle surveille donc sa montre et tente de supporter la douleur intense.

A l’aube, Jessica effectue la préparation requise pour aller au bloc, où elle restera 2h. Les chirurgiens ouvrent son genou pour y placer un clou centromédullaire. Ils mettent aussi en place deux vis à la malléole et une vis au niveau de la jambe pour tenir et réaxer le tibia et le péroné. L’équipe médicale lui indique que la rémission de son tibia est considérée comme prioritaire. Elle doit rester immobile 1 mois et demi et ménager le plus possible sa jambe.

Un réveil difficile et douloureux

Sportive de cœur et de métier, Jessica éprouve des difficultés face à la contrainte de rester couchée. Elle part vivre sa convalescence chez ses parents à sa sortie de l’hôpital, afin qu’ils puissent l’accompagner. Mais, déjà, la volonté de remonter à cheval refait surface, avec la pugnace envie de se battre pour retrouver son autonomie. Elle commence la rééducation auprès d’un excellent kinésithérapeute, mais, malgré les nombreuses séances, on ne constate pas la progression attendue.

Et malheureusement, quelques semaines après l’opération, c’est avec déception qu’elle apprend que sa jambe n’a pas très bien guéri. Une plaie semblable à une brûlure apparait au niveau du mollet. Les infirmiers, en charge des soins hebdomadaires, lui conseillent d’aller consulter le chirurgien qui l’a opérée. Finalement, c’est l’un de ses confrères qui l’opère, il retire la lésion et laisse 5 points de suture. Les points ne tiennent pas et la cicatrisation n’est que partielle. Jessica rentre chez elle et poursuit ses soins. Plus d’un mois après cette seconde opération, sa jambe n’est toujours pas consolidée. Elle sent que l’évolution n’est pas positive, mais le médecin qui la suit ne semble pas alarmé. Malgré tout, lors d’une visite de sa voisine, infirmière de bloc en orthopédie, elle lui parle de ses difficultés. Son amie constate alors une nécrose de la plaie.

Prise en charge au CHU de Clermont Ferrand

En décembre 2016, soit 5 mois après l’accident, elle obtient un rendez-vous au CHU de Clermont-Ferrand pour une prise en charge dans le service dédié.

Avec le recul, Jessica se rend compte qu’elle se voilait la face ; elle reste déçue du suivi médical et de l’accompagnement. Elle se rappelle qu’à ce moment-là, où se déroulaient des JO de Rio, Samir Ait Said, gymnaste de haut niveau, a raté la réception d’un saut et chute. Les médias parlent de sa double fracture, malgré tout, un mois plus tard il courrait de nouveau et avait repris les entrainements. Elle compare donc sa situation, et même si les encadrants et les enjeux ne sont pas les mêmes, la différence de reprise est édifiante.

« J’ai toujours voulu remonter à cheval, c’est inscrit dans mes tripes ! »

Jessica Berthet

Troisième opération

Elle subit alors une troisième opération ; en salle de réveil, elle se sent soulagée : les médecins n’ont pas eu besoin de mettre en place un fixateur externe. Elle le redoutait, à 23 ans seulement cela aurait été compliqué et douloureux !

Les quelques jours et semaines suivants ne sont pas faciles, avec des saignements, des douleurs permanentes, mais surtout une remise en question profonde. Elle réfléchit à sa pratique de l’équitation, qu’elle adore, mais qui lui a déjà causé plusieurs blessures. Elle a peur des conséquences de cette dernière chute. Pour la première fois en 20 ans, elle pense à mettre de côté sa passion, qui est aussi son métier. Les embûches de ce parcours médical sont une épreuve.

Une fois réopérée en mars, le chirurgien retire le clou et traite l’infection de la plaie, elle passe 3 semaines supplémentaires à l’hôpital. On lui administre beaucoup d’antibiotiques pour traiter l’infection. Elle n’a désormais plus de matériel dans la jambe, elle doit toutefois porter une orthèse de cheville et rester immobilisée plus d’un mois et demi.

L’allogreffe : la solution de la dernière chance

Lors d’un examen de contrôle, on constate que l’os ne s’est toujours pas solidifié. On lui présente alors deux solutions. La première, l’auto greffe, qui consiste à prélever le greffon osseux sur le patient qu’on va greffer, à des endroits où l’os se reconstitue facilement, ou sur des régions pour lesquelles le prélèvement du greffon n’induira pas de désagréments majeurs. Dans ce cas, il s’agit d’un prélèvement partiel de la crête iliaque, réimplanté ensuite au niveau de la lésion.

La seconde est une allogreffe, encore peu connue à l’époque, pour laquelle les greffons sont prélevés sur des patients en état de mort cérébrale, d’arrêt cardio-respiratoire, ou sur des patients ayant subi une ablation osseuse, lors par exemple de la pose d’une prothèse. Ces fragments d’os sont par la suite conservés dans des banques de tissus, afin d’être réimplantés sur d’autres patients. Son grand-père ayant subi une autogreffe, il lui raconte son expérience, marquée par une immense douleur due au prélèvement de la crête iliaque. Ce récit conditionne son choix, elle ne veut pas vivre cette douleur et souhaite bénéficier de cette technique médicale.

L’allogreffe : la fin d’une longue souffrance

L’opération est prévue en mai, elle se déroule en moins de 2 heures. On place une plaque et des vis autour de sa jambe, qui ne seront retirés que s’ils provoquent une gêne afin de ne pas causer un traumatisme supplémentaire aux chairs. Elle est de nouveau immobilisée et doit recommencer un cycle de rééducation. Les douleurs sont supportables grâce aux médicaments. Deux mois après son allogreffe, lors d’un rendez-vous de suivi postopératoire, elle passe une radio. Cet examen permet de voir (enfin !) une évolution positive et un début de consolidation. Jessica est rassurée et reprend espoir, elle est impatiente de pouvoir reprendre sa vie professionnelle. Les contrôles s’espacent tous les trois mois. Au total, cela fait un an et demi qu’elle n’est pas montée à cheval et elle trouve le temps long !

Bilan et témoignage

Finalement, son parcours aura duré plus de 16 mois, avec beaucoup de rééducation, d’allers-retours à l’hôpital et des variations de moral. Désormais, Jessica marche sans problème, elle ne peut pas encore courir, mais a pu partir 4 jours explorer les paysages de sa région à raison de 20km chaque jour ! Elle a d’abord repris sous la forme d’un mi-temps thérapeutique, puis à plein temps, pour sa plus grande joie et celle de ses élèves.

Entre temps, elle est devenue maman. La grossesse s’est bien passée avec quelques sensations différentes qui lui rappelaient les lendemains d’opération, mais elle a vite été rassurée : maternité et greffe massive ne présentent aucune incompatibilité.

« Aujourd’hui je revis. Il faut toujours croire en la guérison, toujours aller de l’avant et se battre ! »

Jessica Berthet

Jessica accorde une confiance absolue aux chirurgiens du CHU, qui ont été exceptionnels et très à l’écoute, tout au long de ce parcours. « Encore aujourd’hui, je n’hésite pas à les solliciter lorsque j’ai un doute » évoque Jessica. Grâce à leur accompagnement, elle n’a pas hésité à accepter l’allogreffe, un type de transplantation qui lui était pourtant inconnue.

Convaincue par l’utilité de la greffe, elle souhaite se rendre utile et a fait part à ses proches de son envie profonde d’être donneuse. « Faites-le et parlez-en, à vos amis, votre famille, vous aiderez de nombreuses personnes en attente d’un petit miracle »

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